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Fuller House: On prend les mêmes…

Fuller House: On prend les mêmes…
Fabrice Simon

A la fin des années 80, les séries familiales faisaient, par leur humour et la banalité des situations vécues, la joie des petits téléspectateurs comme des grands. Madame est servie, Notre belle famille ou bien encore Huit ça suffit s’imposèrent des deux côtés de l’Atlantique en axant leur discours sur les valeurs traditionnelles que représentent la famille, le pardon et la tolérance. Vingt années plus tard, Netflix propose la suite d’une de ses séries, Full House ou La Fête à la maison en version française, en appliquant peu ou prou les mêmes recettes qu’il y a deux décennies.

Série télévisée comportant presque deux cents épisodes, Full House (qu’on peut traduire littéralement par « c’est complet ») fut diffusée par ABC entre 1987 et 1995. Créé par Jeff Franklin, La Fête à la maison remporta un succès populaire conséquent – le dernier épisode reçu une audience record de 24 millions de téléspectateurs – et permis à certains de ses acteurs d’accéder à une gloire médiatique méritée.  En France, ce programme fut diffusé sur Antenne 2 et notamment dans l’excellente émission de fin d’après-midi, Giga. Loin d’être hilarante à la différence de certaines sitcoms d’époque, La Fête à la maison garde l’image d’une série assez conservatrice, prônant la solidarité et l’unité comme valeurs refuges et portée un discours sans insultes, sans vulgarités voire sans allusions sexuelles. Gentillette et sympathique, cette série, rediffusée de temps à autre sur le satellite, destinée à une public de jeunes adolescents, a néanmoins énormément vieilli et ne semble plus avoir conservé le charme d’antan.

Full House

Pour la suite intitulée Fuller House (ou en français La Fête à la maison vingt ans après), aucune nouveauté concernant l’ambiance générale de la série ne viendra perturber le fan de base : peu de plans d’extérieur, mêmes décors que l’œuvre originelle, situations quasi-identiques (le deuxième épisode de cette suite est une copie quasi-conforme du pilote datant de 1987), réactions du public enregistrées, etc…. Pour le quadragénaire nostalgique, la sensation d’investir des territoires connus prédomine, avec tous les effets « madeleine de Proust » positifs induits. D’ailleurs tous les acteurs de la série de base – à l’exception des sœurs Olsen, objet d’un très drôle clin d’œil au début du premier épisode – ont répondu présent pour cette suite supervisée par le créateur de l’époque. Malheureusement, chef d’orchestre des treize nouveaux épisodes proposés par Netflix depuis le 26 février, Jeff Franklin ne semble pas s’être rendu compte que les années 90 sont, en termes de narration télévisuelle, à des années-lumières des productions actuelles. Copie à l’identique (en version féminine) de la trame de son modèle – une jeune veuve, Donna-Jo dit D.J., doit élever ses trois fils avec l’aide de sa sœur et de sa meilleure amie ! – Fuller House en adopte également le ton résolument familial et conservateur. Parsemant ses intrigues d’allusion politiques (Donald Trump est devenu l’équivalent d’un rare gros mot utilisable par les enfants) ou de légères critiques audiovisuelles (sur la télé-réalité et les talk shows), chaque épisode de cette sitcom garde intégralement le même déroulement narratif que sa grande sœur. Démarrée par une situation contraignante que seule l’union de la famille, sous l’autorité maternelle, permet de résoudre, chaque aventure se termine par une étreinte finale intervenant  pour sceller le pacte de bonne conduite indispensable au bon déroulement d’une excellente vie communautaire.

Pourvu des mêmes qualités que son aînée, l’œuvre proposée par Netflix en garde malheureusement les mêmes défauts comme ses rires enregistrés et administrés à intervalles réguliers, à la mode il y a vingt ans mais complètement dépassés à l’heure actuelle. De plus, l’absence de véritable enjeu sur la saison (à l’exception du choix de D .J. concernant son futur aimant) amène à se désintéresser constamment des histoires vécues par cette famille recomposée. Reste que malgré tout, si l’on est capable de passer outre des dialogues parfois niais, des situations déjà vues mille fois et de jeunes acteurs relativement mauvais (essentiellement les adolescents), il peut subsister une certaine joie résultant essentiellement du plaisir de revoir sporadiquement les excellents comiques que sont John Stamos, Dave Coulier et Bob Saget.

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Le premier garde un  physique semblant inaltérable ; interprète de la série Urgences lors des dernières saisons de ce monument télévisuel, Stamos, également producteur du show, sait tout ce qu’il doit au rôle d’Oncle Jesse et amène son dynamisme et son humour aux trop rares épisodes qu’il traverse, souvent au côté de son double féminin, l’excellente Lori Loughlin. Le second, acteur de stand-up et aperçu dans How I Met Your Mother notamment, n’aura certainement pas eu la carrière télévisuelle auquel il aurait pu aspirer. Charismatique, il domine notamment le troisième épisode de tout son talent, finalement guère exploité dans cette suite. Enfin, Bob Saget, également acteur de stand-up mais aussi présentateur télé, est certainement, des trois, le plus distancié et le plus drôle. Adoptant une attitude décalée dans le pilote, il n’intervient malheureusement que lors d’un seul autre épisode. Choix contraint par les producteurs désireux « d’émanciper » les trois vedettes féminines mais regrettable tant le charisme naturel de cet acteur lui permet d’imposer son talent tout empreint de flegme.

Car les stars incontestables de cette première saison sont les trois jeunes filles de la première version qui occupent maintenant un rôle de trentenaire à qui la vie n’a pas réservé que des plaisirs : divorce pour l’une, veuvage pour l’autre et stérilité pour la troisième. Nulle doute qu’à travers cette série humoristique les auteurs ont voulu aborder des sujets sensibles mais leur traitement superficiel n’amène certainement pas l’intérêt et la réflexion souhaités. Malgré tout, les trois actrices, Candace Cameron, Jodie Sweetin et Andrea Barber, dont les carrières depuis vingt ans n’ont pas connues l’évolution promise, ne s’en sortent pas trop mal même si le décalage avec leurs rôles enfants n’amène pas le même regard rempli de tendresse que le téléspectateur adopte avec les trois interprètes masculins.

Au final, même si cette saison comporte certaines scènes magnifiques (comme une danse Made In Bollywood ou un combat de catch mexicain des plus spectaculaires), elle reste parfaitement dispensable pour la plupart des téléspectateurs. Ciblée pour un public nostalgique Fuller House est une œuvre pleine de bons sentiments qui ravira les plus ancien d’entre nous, du moins lors de la vision de son premier épisode.

Crédits: Netflix