On l’attendait comme le messie. Nos cerveaux essorés par le matraquage promotionnel étaient conditionnés, le compte à rebours défilait, et enfin, ça y est, Agents of S.H.I.E.L.D. était là (au passage, tous les journalistes et blogueurs de la planète se font des crampes à chaque fois qu’ils doivent taper ce fichu titre).

Bref, Agents of S.H.I.E.L.D. (aïe !) portait en elle tous les espoirs de la communauté sériephile d’obédience geek. Lorsque internet s’est ému à l’unisson de la commande de ce projet, on aurait sans doute dû se méfier. On commençait à se douter que même avec un budget de 14 millions de dollars (le coût du pilote), on aurait peu de chance de voir un bout de l’armure d’Iron Man ou un centimètre du gros orteil de Hulk. Et puis, le trailer est sorti (et pourtant, on y voyait bien un bout de l’armure d’Iron Man ou un centimètre du gros orteil de Hulk). La paternité avec Avengers était bien sûr mise en avant, revendiquée, mais la série se concentrerait sur des hommes tout ce qu’il y a de plus humains. Pourquoi pas. Le S.H.I.E.L.D. a pour mission de traquer des super-héros pour mieux les canaliser ? Ok on prend ! Sauf que ce n’est pas tout à fait ça, du moins pas dans le pilote. Le « super » du jour n’a de super que la technologie greffée à son bras. On délaisse peu à peu le genre super-héros pour glisser vers la pure SF. Chaque semaine, l’équipe partira aux trousses d’un super-humain. On glisse également vers le format du « cop show », à la manière d’une enquête, bouclée à la fin de l’épisode.

Il ne faut pas perdre de vue que nous sommes sur ABC, un network qui, comme beaucoup de networks, affectionne les séries à épisodes bouclés, le trop feuilletonnant ne permettant pas aux téléspectateurs de rejoindre la saison en cours de route. Dans le cas d’Agents of S.H.I.E.L.D., le pilote passe finalement plus de temps à poser le concept et à raccrocher les wagons avec Avengers qu’à envisager une mythologie fournie. En cela, la série rappelle ce que faisait Fringe à ses débuts.

Mais là où Agents of S.H.I.E.L.D. gagne son pari c’est lorsque la série cherche à rassembler sous son étendard le public le plus large possible. Le défi était double : ne pas perdre un fandom geek déjà, a priori, acquis à sa cause, et attirer le grand public, pas forcément familier de l’univers Marvel. Joss Whedon était bien entendu l’homme de la situation. Parce qu’il avait réalisé le film Avengers, mais aussi, parce qu’il réussit à mêler sa dévotion pour la franchise à un humour qui évite à Agents of S.H.I.E.L.D. de trop se prendre au sérieux. Le pilote est une belle preuve que l’on peut aborder un mythe avec un peu de recul et beaucoup d’auto-dérision, sans jamais pour autant lui porter atteinte.

Au final, Agents of S.H.I.E.L.D. est fun, décomplexé, avec ce qu’il faut d’action et de comédie. On y retrouve des personnages féminins forts, chers à Whedon, et des dialogues ciselés qui se permettent même de réécrire le mythe : « De grands pouvoirs impliquent… un sacré paquet d’emmerdes ». On pourrait ajouter que de grandes attentes impliquent souvent une légère déception à l’arrivée, mais néanmoins, pour toutes ces raisons, Agents of S.H.I.E.L.D. sera probablement un très sympathique divertissement.

Crédits: Marvel Television