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Pramface, le problème de la saison 2

Pramface, le problème de la saison 2
Claire Tirilly

Pramface est une drôle de petite sitcom anglaise de la BBC, dans la lignée de Gavin and Stacey, mais façon ado. Grâce à Netflix, qui me la fait clignoter au visage dès que je me connecte, j’ai pu enfin la découvrir. Malheureusement, après ce post, vous ne voudrez probablement pas la regarder vous même. Mais c’est de sa faute, elle avait qu’à pas faire comme plein d’autres séries: rater sa saison 2.

Donc Pramface, ou “face de landeau” dans le texte, c’est l’histoire de Laura, 18 ans, fraîchement sortie de ses exams, qui noie sa colère contre ses parents dans une bouteille de vin blanc. C’est aussi celle de Jamie, 16 ans, qui vient fêter la fin de ses exams en squattant une fête dans les beaux quartiers, espérant perdre sa virginité, misant plus sur un malentendu que sur ses capacités à séduire la gent féminine. Et forcément, ce soir là, Laura, complètement bourrée, et Jamie vont se rencontrer, et terminer au lit. Pramface explore donc en première saison une grossesse adolescente entre deux gamins qui n’ont pas grand chose en commun, mis à part le bébé à venir. Et oui, j’admet le spoiler, il est indispensable si on veut parler correctement de la série.

En 6×30 minutes, la première saison explore avec justesse la question de la grossesse, le comment, le pourquoi, et les relations qui doivent inévitablement se nouer d’une manière ou d’une autre entre Jamie et Laura. Par des astucieux sauts dans le temps à chaque épisode, on se concentre sur ce qui est le plus important: Laura et Jamie, qui ont conscience de la force et de la responsabilité qui les attend, et qui flippent. Et c’est bien! C’est drôle, touchant, maladroit… ça laisse un peu de place aux personnages secondaires mais pas trop pour qu’ils en deviennent énervants… Bref, c’est une bonne sitcom.

Pramface

Et puis vient la saison 2, celle qui était envisagée mais pas vraiment complètement prévue au départ. Alors on gère avec les personnages en espérant que ça marche. Spoiler alert, le bébé est né, et forcément, ça crée des problèmes, mais pas tant que ça au final, parce qu’on a pas envie de faire de Laura et Jamie de mauvais parents. On est dans une comédie positive, pas dans un docu-réalité. Les personnages galèrent, et c’est drôle, mais s’en sortent quand même au final. Et puis on a plus le temps de développer des storylines parallèles avec les personnages secondaires, malheureusement. Car autant certains sont excellent en soutien, autant ils peuvent vraiment devenir irritants quand on leur donne trop de place. Jamie et Laura eux-même perdent en finesse au passage. Autant la saison 1 était drôle et juste à niveaux équivalents, autant la seconde crée une tension inutile et la compense par un comique de situation pas toujours du meilleur goût. Les 6 épisodes passent plus lentement cette fois-ci, et si ce n’était pour les previews en fin d’épisode, on s’arrêterait plus facilement. C’est lâche comme technique.

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Entre les deux saisons, la famille a gagné un bébé mais la série a perdu en structure, planification et peut-être un peu en âme. Curieusement, l’artifice “bébé” est moins fort que la grossesse en elle-même et je ne peux m’empêcher de penser que c’est de la faute des scénaristes. Comme souvent après une super saison 1, ils se retrouvent au défi de devoir renouveler l’exploit, mais sur une base différente. Et c’est peut-être là que réside le problème, le concept. L’idée sur laquelle se fonde la série change au bout de la saison 1 et les scénaristes ne parviennent pas à s’y adapter parfaitement, au point qu’on se demande si il ne fallait pas s’arrêter en fin de saison 1, tant pis pour le développement des personnages.

Pramface n’est pas la première dans ce cas, The Newsroom a passé toute la saison 2 à tenter de nous faire oublier la saison 1, considérée défaillante par son auteur. Lost s’est perdue en saison 2. Et tous les auteurs d’un hit musical, télévisuel ou litteraire vous raconteront l’angoisse de recommencer à écrire quand on est attendu au tournant. Hart of Dixie en fait même l’objet d’une storyline. Pourtant, doit-on systématiquement le pardonner histoire de donner leur chance aux auteurs de se remettre de la pression sous laquelle ils écrivent?

Pour moi, ça se joue au cas par cas. Pramface n’a que 6 épisodes en saison 2, mais elle commence sur un épisode particulièrement bien mené, la déception qui suivra n’en sera que plus forte. Les séries américaines sur 12 ou 22 épisodes ont elles une plus grande chance de rattraper le coup en modifiant les arcs défaillant en cours de route. Et puis pour une partie des séries de network, l’écriture et la diffusion se font presque en temps réel, avec seulement quelques semaines d’écart, ce qui laisse l’opportunité aux scénaristes de s’adapter rapidement à la critique. Pour une fois, ce type de diffusion peut être salutaire aux auteurs. Le format anglais (et français aussi), lui, est moins maléable. Il se passe parfois 6 mois entre le tournage et le passage en télévision.

Malgré tout, vous savez quoi? je vais aller la voir, la saison 3, mais c’est plus parce que la série est tournée dans ma ville et que j’ai une certaine fierté à reconnaître les lieux. Et puis, je perd pas espoir que les auteurs retrouvent leur énergie de la saison 1, enfin.

Crédits: BBC 3