Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image
Scroll to top

Top

Un Commentaire

Season One fais-moi peur avec… Doctor Who

Season One fais-moi peur avec… Doctor Who
Delphine Rivet

On pourrait croire qu’il s’agit de faire « BOUH ! » pour glacer le sang instantanément. C’est un ressort que l’on croise dans de nombreux films d’horreur, la surprise, le choc purement visuel qui fait sursauter, en invoquant un réflexe primitif. Après tout, si on s’en sert pour faire partir le hoquet, c’est que ça n’est pas si traumatisant que ça. En réalité, les mécanismes de la peur sont bien plus complexes et le siège de l’angoisse se situe bien plus profondément. Une bonne frayeur, ça se mérite, et surtout, ça sait se faire désirer.

Je suis une adepte du genre. J’aime me faire peur (tant que ça n’implique pas de saut à l’élastique du haut du pont). J’ai énormément de souvenirs effrayants liés à des films, des livres ou des séries. Petite, j’ai été traumatisée par le Téléchat (oui je sais, ce n’était pas censé faire peur). Plus tard, je prenais un malin plaisir à regarder Les Contes de la crypte en quête d’histoires bien kitsch et flippantes. Puis je suis tombée sur X-Files, dont certains épisodes ont eu un effet dévastateur sur mon esprit juvénile. Je me souviens de sensations, d’images, de scènes… mais guère plus malheureusement. Ma mémoire étant ce qu’elle est aujourd’hui, je serai bien incapable de me rappeler d’un épisode d’X-Files ou de Buffy dans son intégralité, ou du moins, suffisamment dans le détail pour vous en parler.

En revanche, grâce aux multi-rediffusions de Doctor Who sur France 4, l’un des épisodes de la série, qui me terrifie encore à ce jour, est bien frais dans ma tête. C’est en fait un double épisode : The Empty Child et The Doctor Dances, les 9 et 10 de la saison 1 (de l’époque moderne), écrits par Steven Moffat. J’en ai la chair de poule rien que de m’y replonger pour les besoins de cet article.

Histoire de vous planter le décor : Rose et le Docteur débarquent en plein Blitz londonien. La compagne croise un petit garçon, portant un masque à gaz sur le visage et qui lui demande « es-tu ma maman ? ». Elle rencontrera ensuite le Capitaine Jack Harkness (dont c’est la première apparition dans Doctor Who). Le Docteur, quant à lui, suit la jeune Nancy qui, accompagnée d’un groupe d’enfants, s’est réfugiée dans une maison, profitant de la panique et du départ de ses habitants pour faire main basse sur la nourriture. Derrière la porte de la maison, résonnent à nouveau ces mots : « es-tu ma maman ? ». Le Docteur est aussi intrigué qu’apeuré par la vision de ce garçonnet sans visage. Nancy le prévient, s’il le laisse le toucher, il deviendra comme lui : vide.

Ce double épisode joue sur plusieurs facteurs d’angoisse. D’abord l’horreur de la guerre, des bombardements, de la menace constante d’une attaque. Il décide de se concentrer sur des victimes collatérales dont les livres d’histoire parlent finalement assez peu, les enfants. La peur d’une contamination (un principe sur lequel reposent par exemple les histoires de zombies) est également une émotion très primitive qui fait appel à l’instinct de conservation et fait ressortir le pire chez l’être humain. N’importe qui peut être porteur du virus, tout le monde est un potentiel ennemi, la seule solution est de ne toucher personne, de ne pas se laisser approcher, de se cloîtrer… Avec une contamination, il y a aussi cette idée terrifiante de non-mort. Comme pour les zombies, ceux qui sont atteints de cette étrange affliction ne partent pas de manière paisible, non, ils suffoquent, se transforment et deviennent vides. Je ne sais pas vous, mais moi, déjà, j’ai les poils des bras qui se hérissent.

Et puis, comme si cela ne suffisait pas, la menace vient d’un enfant, l’innocence incarnée. Un paradoxe avec lequel il est difficile de composer, à l’image du Docteur qui a tantôt envie d’aider ce petit, tantôt le craint, puis lui ordonne d’aller dans sa chambre. Ce masque à gaz, c’est comme si l’on avait greffé toute l’horreur de la guerre sur le visage d’un ange. Si j’avais été beaucoup plus jeune en découvrant ces deux épisodes, j’aurais certainement vécu l’angoisse (en apparence) de ce garçon qui cherche sa maman. Qu’y a-t-il de pire pour un enfant ? Je me souviens de ces rares fois où, haute comme trois pommes, je perdais ma mère de vue, ne serait-ce qu’un court instant, sur la plage bondée ou dans les grands magasins en période de fêtes. Le sol s’ouvrait sous mes pieds : j’étais perdue, et c’était les secondes les plus terrifiantes de ma jeune existence.

Aujourd’hui, en tant qu’adulte, je suis moins sensible à cet aspect-là. En revanche, la toute fin de l’épisode m’a bouleversée. On découvre alors que l’enfant vide n’est pas le petit frère de Nancy, mais son fils. C’est un choc pour moi, elle n’est encore qu’une gamine. Je n’ose imaginer ce que peut cacher cette maternité précoce, je m’y refuse presque.

The_Empty_Child_Jack_and_Rose

Steven Moffat n’a jamais aussi bien écrit que lorsqu’il était showrunné par Russell T. Davies et ce double épisode, comme celui de Blink a un autre niveau, prouve qu’il a compris que la peur, ce n’est pas juste une réponse à un stimulus. C’est une construction, une progression, c’est invoquer des angoisses enfantines et simples. Les choses qui nous terrifiaient étant petits ont apparemment encore un certain effet sur nos cerveaux d’adultes. En ce qui me concerne, ce sont les clowns et les mômes flippants (poke le petit Victor des Revenants).

Crédits: BBC WorldWide
Retrouvez Il était une fois un Doctor (9/11): The ninth Doctor

  • Anaïs

    Tout à fait d’accord ! Cette épisode, ainsi que ceux où sont présents les anges pleureurs, sont vraiment angoissant. Moi j’ai un souvenir plus « noir » du premier épisode où l’on voit les anges pleureurs. J’étais chez moi dans le noir à regarder toute la soirée la série, et je suis tombé sur cet épisode vers les 2-3heures du matin. Je n’ai jamais été aussi réveillé de ma vie !