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Un Commentaire

Versus Episode 1: Glee vs Smash

Versus Episode 1: Glee vs Smash
Christophe Brico

West Side Story, Cats, Les Misérables, Rent, et tant d’autres… La comédie musicale est certainement un des aspects les plus caractéristiques de la culture populaire américaine. Consacrée au cinéma depuis l’avènement du parlant, elle se fait beaucoup plus rare à la télévision. On citera volontiers Fame (1982-1987 sur NBC) adaptée du film éponyme d’Alan Parker ou l’éphémère Cop Rock , mais depuis (ça fait presque 30 ans quand même !)…rien ! Nada ! Que dalle ! Si ce n’est des épisodes musicaux ici et là… Jusqu’en 2009.
A la rentrée de cette même année débarque sur la Fox l’ovni Glee, suivi, en 2012 sur NBC, de Smash, qui remettent à l’honneur l’histoire chantée, la Mecque qu’est Broadway, et des demi-dieux ou déesses comme Andrew Lloyd Webber, Bob Fosse ou Barbara Streisand. Séries différentes ? Complémentaires ? soyez prêts pour le face à face.

LES ADVERSAIRES

Glee (2009 -…)

Credits : 20th Century Fox Television

Credits : 20th Century Fox Television

Créé par Ryan Murphy & Brad Falchuk (Nip/Tuck, American Horror Story) avec Ian Brennan,
Il s’agit d’une comédie (assez potache même) dont chaque saison est constituée de 22 épisodes de 45 minutes. La série met en scène la chorale – le “Glee Club” – du Lycée William McKinley à Lima dans l’Ohio, dont les membres sont en grande partie « les loosers » du bahut, épaulés de quelques sportifs et pom-pom girls. Dirigé par Will Schuester (Matthew Morrison) – “Mr. Shue” -, professeur d’Espagnol, le Glee Club trouve son plus grand adversaire en la personne de Sue Sylvester (Jane Lynch), entraîneuse de l’équipe de pom-pom girls.

L’essentiel du cast est composé par les jeunes membres de la chorale, Rachel (Lea Michèle) et Finn (le regretté Cory Monteith) en tête, entourés du jeune gay Kurt (Chris Colfer), du bad boy “Puck” (Mark Salling), la capitaine des pom-pom girls Quinn (Dianna Agron), le crooner en fauteuil roulant Arty (Kevin McHale), la blonde décérébrée Brittany (Heather Morris), la mama afro-américaine Mercedes (Amber Riley), l’hispano caliente Santana (Naya Rivera) et le couple asiatique Tina (Jenna Ushkowitz) et Mike (Harry Shum Jr.), ouf !

Ce groupe assez pléthorique (pour une série) est réellement le coeur du show, et s’il évolue avec les saisons (surtout à partir de la saison 4), l’histoire de chaque personnage est relativement bien développée.

La série est définitivement une comédie musicale, chaque épisode proposant au moins 3 ou 4 numéros, du solo au numéro de groupe complet, et le chant est complètement intégré à la narration. Globalement, le coeur de la narration tourne autour du Glee Club, de la vie au Lycée et de la compétition avec d’autres chorales. Le fait d’utiliser le contexte d’un lycée permet à la série, un peu à la manière de Fame, d’être à la fois une série musicale et une série teen.

Smash (2012 – 2013)

Credits : Universal Media Studios

Credits : Universal Media Studios

Première création télévisuelle pour Theresa Rebeck (qui a déjà officié tout de même sur New-York Section Criminelle et New-York Police Blues), la série est un drama aux tendances soap dont les saisons font 15 ou 17 épisodes au format 45 minutes.
Au fil de ses deux saisons Smash raconte la conception d’une comédie musicale, “Bombshell”, autours du personnage de Marilyn Monroe. La seconde saison, marquée par le départ de la créatrice du show, met en scène un second spectacle, “Hit List”, dont l’histoire est inspirée de la conception de la comédie musicale Rent.

Le cast de la série est assez solide, autour de l’équipe de création du spectacle: les auteurs, Julia Houston (Debra Messing) et Tom Levitt (Christian Borle), la productrice Eileen Rand (Anjelica Houston) et le metteur en scène/ chorégraphe Derek Wills (Jack Davenport), et pour porter la tension dramatique, deux actrices en compétition : la blonde Ivy Lynn (Megan Hilty) et la brune Karen Cartwright (Katharine McPhee).

Ce groupe stable sera au coeur du show du premier au dernier épisode, même si le changement de showrunner en saison 2 va substantiellement changer également le caractère et la nature des personnages… pas nécessairement pour le meilleur

Mise en abîme absolue de la comédie musicale – une comédie musicale qui raconte la fabrication d’une comédie musicale -, la série a su en première saison proposer une narration construite, un répertoire de morceaux originaux et quelques numéros chorégraphiés très biens fichus. Série adulte, on est témoin des rivalités, des espoirs, des déceptions, des humiliations et des succès de cette troupe.

… FIVE, SIX, SEVEN, EIGHT !

Glee et Smash ont en commun un mode de narration particulier, dans lequel le chant et la danse font intégralement partie de l’univers dans lequel évoluent les personnages. Dans les deux cas, les héros fabriquent un spectacle, scolaire pour l’un et professionnel pour l’autre. Souvent l’incursion musicale se fait dans ce cadre, mais cette narration chantée prend également le pas sur les dialogues et devient une façon de raconter l’histoire à part entière. En cela, les deux séries s’inscrivent totalement dans le mode comédie musicale d’inspiration Broadway.

Smash, dans son concept, colle beaucoup plus à l’inspiration Broadway. La tentative du show est de raconter la création d’une comédie musicale de l’idée, scène que l’on voit dans le pilote, à la représentation dans un grand théâtre New-Yorkais. A ce titre la série est beaucoup plus “premier degré” par rapport à son inspiration, mais aussi, du coup, propose une expérience beaucoup plus proche de cet univers au spectateur.

Glee à l’inverse, se joue dans un univers adolescent, d’une part, et complètement décalé, d’autre part. Dès lors, la partie consacrée au montage de spectacle est plus ou moins similaire d’une saison à l’autre, et c’est sur l’histoire des personnages que la série prend toute sa dimension de feuilleton. L’expérience Broadway est du coup moins directe, mais l’univers décalé, potache et la facilité de raconter une high school story – ce sont un peu toujours les mêmes enjeux -, a sans doute donné à la série une meilleure base pour durer.

Smash : une des Marilyn Monroe au coeur de “Bombshell” (Crédits : Universal Media Studios)

Smash : une des Marilyn Monroe au coeur de “Bombshell”
(Crédits : Universal Media Studios)

 

Glee : même au Lycée on fait des trucs avec des paillettes (Crédits: © 20th Century Fox Television)

Glee : même au Lycée on fait des trucs avec des paillettes
(Crédits: © 20th Century Fox Television)

ONE FOR THE MONEY, TWO FOR THE SHOW

A l’issue de sa catastrophique seconde saison, Smash a été annulée, alors que Glee malgré une significative érosion des audiences, et la disparition récente de Corey Monteith, se prépare à sa saison 5. Qu’est ce qui a participé du succès de l’une et de l’échec de l’autre ?

Sans doute le statut de précurseur de Glee a participé a son succès. Avec des niveaux d’audience autour de 10 millions en saison 1 et de 11,5 en saison deux, la série a bénéficié d’un succès immédiat et a mis en évidence le goût du public américain pour le genre “Musical”. Il faut ajouter également que Glee a usé de tous les artifices marketing possibles très tôt : disques, concerts, participation à des émissions de real TV orienté “chant” (X-Factor par exemple), teasers originaux pour les nouvelles saisons, etc.
Ensuite, le répertoire musical de la série s’inspire de multiples influences et, un des énormes atouts de la série, réside dans sa capacité à faire des reprises de chansons pop – plus ou moins connues -, qui lui permettent de toucher le public le plus large. Remettant au goût du jour le titre de Journey “Don’t stop believin’”, Glee en a fait l’hymne de son histoire. Enfin, en dehors de l’aspect musical, le ton de la série est à la fois adolescent et potache. Dès lors il capte le public des teen séries, mais aussi plus simplement un public de comédie, notamment grâce à des personnages comme celui de Sue Sylvester (Jane Lynch) ou encore du coach Beist (Dot Jones).

Glee : Un épisode hommage à Michael Jackson (“Michael” - 3.11) (Crédits: 20th Century Fox)

Glee : Un épisode hommage à Michael Jackson (“Michael” – 3.11)
(Crédits: 20th Century Fox)

Pratiquement à l’opposé, Smash, s’est dès le départ positionnée sur une approche plus traditionnelle de son inspiration. Sans doute, l’experience “Broadway” de la créatrice et showrunner de la première saison, Theresa Rebeck, y est pour beaucoup. Du coup qu’il s’agisse de l’approche narrative du scénario ou même de la partition musicale, on est devant ce que l’on peut imaginer de plus traditionnel s’agissant de Broadway, quelque part entre Chicago et Phantom of the Opera. Pourtant, la profondeur des personnages, et leurs défaut, font le relatif succès de la première saison. Hors de l’aspect musical, c’est bien une histoire de type Soap opera que raconte Smash, incluant son lot de problèmes conjugaux et familiaux, de rivalités, de tromperies, de secrets inavouables et d’actes désespérés. La musique au coeur de la série évoque plus facilement les grands morceaux de Cats ou My fair lady, et sont pratiquement tous des créations originales. Cette approche un peu plus radicale a sans doute séduit un public moins large mais relativement honorable en première saison avec une moyenne de 6,7 million de téléspectateurs.

Malheureusement le passage à la seconde saison a creusé définitivement la tombe de Smash. Après le départ de Theresa Rebeck pour d’énormes divergences d’approche avec NBC, la chaîne fait appel à Joshua Safran, ancien de Gossip Girl, pour reprendre en main le show. Hélas malgré une assez bonne idée dans l’ajout d’un second spectacle plus moderne, “Hit List”, qui ouvre un espace à des intrigues plus contemporaines et plus “jeunes”, Safran se perd dans la multiplication des enjeux secondaires, des tentatives de changer la nature des personnages, créer des conflits artificiels là où ils n’ont pas lieu d’être – Et ne survivent qu’un épisode ou deux -, et rate les embryons d’intrigue les plus prometteurs, comme la potentielle relation type père/fils entre Jimmy et Derek, mis a l’écart au profit du triangle amoureux avec Karen, par exemple.

Smash : L’autre Marilyn dans un duo avec Joe diMaggio (Crédits: Universal Media Studios)

Smash : L’autre Marilyn dans un duo avec Joe diMaggio
(Crédits: Universal Media Studios)

Au final, les deux shows seraient plus complémentaires qu’adversaires. Glee étant une itération de Fame, là où Smash pourrait en être la suite. La première brille par sa capacité à jouer de la culture pop-ulaire là où la seconde témoigne avec une relative précision de la grande tradition américaine de la comédie musicale de Broadway. Néanmoins les audiences, ont parlé. Ou est-ce la malédiction “Spielberg” (Steven Spielberg est producteur de Smash ndlr) ? Ou encore la lente mais certaine chute de NBC ? Quoi qu’il en soit Smash est morte.

Vainqueur du duel: Glee 
Victoire par K.O., si tant est que cette dernière survive à sa 5ème saison.