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Melissa Benoist, une supergirl réhabilitée

Melissa Benoist, une supergirl réhabilitée
Charlotte Calignac

À la rentrée sur CBS, le premier épisode de Supergirl introduisait son univers coloré et son héroïne avec la subtilité d’un Donald Trump bourré. D’ailleurs, malgré les applaudissements de la posture délibérément féministe et positive incarnée par la série, les critiques (plus ou moins justifiées) pleuvaient: mauvaise écriture, dialogue lourdingues à souhait, simplicités scénaristiques, et cette volonté inébranlable de ne faire qu’évoquer à répétition encore et encore sans jamais le montrer le fameux cousin de Kara. Enfin, la plus grosse critique de toutes, restant d’ailleurs la moins valable : « Jessica Jones, c’est mieux, on a déjà une superhéroïne ça suffit, pas besoin de Supergirl ».

Hum.

Si je dois me cogner (joyeusement, du reste), les aventures revisitées 1 million de fois de Superman, Green Arrow, Batman, Flash, ou encore Daredevil (sans rire, la liste est longue), et que j’ai droit de me reconnaître uniquement dans la très cynique et talentueuse (et hardcore) Jessica Jones… Bonjour la déprime. Je suis très contente d’avoir d’un côté Oliver Queen qui se torture et se sent coupable dans Arrow, et de l’autre Flash qui s’amuse de ses pouvoirs et trouve génial d’être un héros parce qu’il le peut. Entre Star City et Central City: c’est le jour et la nuit, littéralement, c’est pourquoi je suis heureuse cette année d’avoir pu profiter des talents de Krysten Ritter sur fond de viol et d’abus divers et variés tout en m’extasiant devant la performance hebdomadaire que représente le travail de Melissa Benoist dans Supergirl.

Et quelle performance!

Encore une fois, les critiques pleuvaient vis-à-vis du personnage de Kara Denvers, considéré comme trop niais, trop girly, trop positif… Ce qui, ajouté à des dialogues qui faisaient grimacer, contribue à renforcer mon respect pour les qualités d’actrice de Melissa Benoist.

L’épisode de la semaine passée (donc attention, spoilers pour l’épisode S1E16) était un exemple de tout ce qui fonctionne très bien grâce à elle. Toute l’ouverture de l’épisode résume les qualités de Kara, celles que depuis le pilot Melissa Benoist défend et incarne avec brio : Supergirl est une icône, elle est bienveillante, pleine d’empathie, ne se laisse jamais abattre. Elle est forte physiquement et émotionnellement, mais ne se sert pas de sa force pour son gain personnel. Sur le plan personnel : Kara Denvers sait pardonner, elle sait encourager et soutenir même si elle n’est pas d’accord, même si certaines actions la font souffrir. Elle n’est pas très affirmée, mais encore une fois : son entourage sait à juste titre qu’il peut compter sur elle.

Supergirl (la série) n’a pas joué sur les rivalités entre filles, bien au contraire : elle a construit sur ces attentes. Lorsque Chyler Leigh, qui interprète la sœur de Kara, finit par révéler un secret dévastateur à Supergirl, une action perpétrée quelques épisodes plus tôt et dont Kara ne se remet pas, l’instinct est immédiat et la compassion dont elle fait preuve font que le conflit et la rupture n’ont pas lieu. On avait alors déjà une scène poignante d’émotion après une confrontation difficile.

Dans l’épisode de la semaine passée donc, alors que Supergirl est atteinte par de la kryptonite rouge, Melissa Benoist doit exprimer un éventail d’émotions qui doivent toutes être convaincantes. On doit croire à sa compassion et sa gentillesse, puis sa descente lente mais sûre vers l’ennui, la mesquinerie, la jalousie, la colère, et la méchanceté. La kryptonite rouge, ou la version atroce d’un personnage habituellement gentil, ont été utilisés presque partout dans les séries, c’est un ressort attendu, autant que sa résolution : généralement avec un retour au statu quo, généralement avec une petite amnésie bien placée qui libère le personnage de conséquences sur le long terme.

Mais la série, intelligemment, refuse de s’accorder cette facilité et capitalise sur la force de son interprète principal.

 Kara est arrêtée après avoir causé des problèmes avec des impacts résonnants, après avoir eu des comportements auprès de ses proches au mieux lamentables, au pire destructeurs. La première réaction du personnage lorsqu’elle se réveille est de demander à sa sœur si elle va bien, avant de s’effondrer en larmes en expliquant qu’elle a conscience des horreurs qu’elle a proféré.

C’est sûr, décrit comme ça, ça laisse un peu froid. Mais Benoist parvient le tour de force, encore et encore, épisode après épisode, malgré de nombreux fonds verts, malgré des interactions tournant autour d’effets spéciaux, donc globalement souvent seule, à incarner Kara Denvers, à me faire oublier l’espace d’une seconde que je regarde une série. En fait, j’arrive à oublier la majorité des défauts de la série. Ce que Kara et Supergirl ressentent paraît réel. J’ai réalisé cette semaine que ça faisait longtemps que je n’avais pas ressenti ça.

Ce n’est pas la première fois que Benoist pleure. Mais chaque fois que Kara exprime une émotion, celle-ci résonne car elle parvient à faire preuve d’une humanité sincère dans laquelle tout le monde peut se reconnaître. La déception de la figure parentale, l’amertume de penser à la vie qu’elle aurait pu avoir, la perte du dernier membre de sa famille, le besoin d’amour, la sensation d’être incomprise, toutes les émotions de Kara se lisent sur le visage de Melissa Benoist sans pour autant diminuer le personnage, sans le rendre faible ou ridicule, même malgré une écriture (j’insiste hein) franchement maladroite.

Supergirl-1x16

Alors certes, la série n’est pas parfaite. Mais si elle fonctionne c’est en immense partie grâce au travail de Benoist qui a réussi à incarner une héroïne positive, humaine et intelligente capable d’inspirer de nombreux enfants et adultes, au même titre que Superman, Batman et Flash. Et une série familiale positive qui tourne autour d’une superhéroïne à qui il n’arrive pas que des traumatismes abominables, sincèrement, ça fait un bien fou.

Crédits: CBS