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7 Commentaires

Empreintes Criminelles: Une bonne série sabordée?

Empreintes Criminelles: Une bonne série sabordée?
Alexandre LETREN

La review

LA SERIE
7
LE SCENARIO
6.5
LE CASTING
6
IMAGE
7
POTENTIEL
7
6.7

PROMETTEUSE

Une série prometteuse mais brisée dans l’œuf par les malheurs de la programmation. Elle mérite une seconde découverte afin de l'apprécier et comprendre que l'on ait peut-être passé à côté d'une très bonne série

C’est souvent en période estivale que les chaîne en profitent pour rediffuser d’anciennes séries télé. Canal+ le fait beaucoup (Engrenages ou WorkinGirls) et France 2 s’y met également en rediffusant dès le 13 août sa série Empreintes Criminelles, co-produite par Septembre Productions et Making Prod (Odysseus), déjà diffusée en 2011 le vendredi soir. Arrêtée au terme de sa première saison de 6 épisodes, Empreintes Criminelles avait pourtant tout pour devenir une excellente série. Qu’est ce qui fait le charme de la série? A-t-elle été sabordée par la diffusion sur France 2?
Lionel Olenga, scénariste (on le retrouvera bientôt sur France 2 dans Cherif) a travaillé sur la série notamment en supervisant l’atelier d’écriture en qualité de co-directeur de collection. Il revient avec nous sur la série, son développement, ses contraintes, ses envies et nous dévoile ce qu’aurait été la saison 2

EC Créateur

Season One: Comment est née l’idée de Empreintes Criminelles?

Lionel Olenga: Stéphane Drouet a eu l’idée originale, celle de raconter l’histoire des premiers policiers scientifiques au début du XXe siècle… qui étaient français. Un élément que tout le monde (ou presque) a oublié et que j’ignorais moi-même. C’était aux alentours de 2007. A ce moment-là, les différentes déclinaisons des C.S.I réalisaient d’énormes scores d’audience sur TF1 et il s’est dit qu’il y avait là une belle idée de série. Il a ensuite contacté Olivier Marvaud pour développer avec lui la bible. France 2 s’est rapidement intéressée au projet. Une convention d’écriture a été signée. C’est juste après que je suis arrivé dans l’aventure. Stéphane cherchait quelqu’un pour co-écrire les deux premiers épisodes avec Olivier. Je les avais croisés tous les deux sur d’autres projets, et j’ai tout de suite accepté, l’idée me paraissant vraiment intéressante. Une des demandes de la chaine était de ne pas avoir de personnages trop lisses, c’est en ce sens que nous avons repris les différents persos de la série. Olivier et moi avons ensuite commencé par un épisode-type (le N°2 : « l’affaire de l’Orient-Express »), puis la chaîne, très satisfaite, nous a demandé d’écrire un « pilote », en tout cas l’épisode de la création de l’équipe. Pour la suite de l’écriture, nous avons fait appel à d’autres scénaristes et avons travaillé en atelier, Olivier Marvaud et moi en assurant la direction.

Season One: L’angle de départ de  la série c’était lequel? 

L.O: Proposer une alternative aux séries de police scientifique, parler de la société française d’aujourd’hui en mettant en avant des lieux, des situations typiques des années 20, qui faisaient échos à la vie des téléspectateurs. Il s’agissait de montrer à quel point ce qui paraît évident pour tout le monde aujourd’hui ( Les Experts et leurs centaines d’épisodes multi-rediffusés sont passés par là) était une aberration à l’époque, autrement dit : en quoi il est difficile d’aller contre la pensée dominante. D’autant que nos héros n’étaient pas infaillibles. Comme dans toute phase d’expérimentation, il leur arrivait de louper leur coup. Nous aimions aussi le fait qu’ils rencontrent autant de résistance et d’incrédulité, jusque dans les rangs de leurs collègues policiers.

Empreintes Criminelles (photo 15)

Season One: A-t-il changé entre le début de l’écriture et le tournage?

L.O: Pas vraiment non, le cadre était le suivant : un plot driven show à histoires bouclées, avec deux intrigues polar par épisode et se focalisant sur la vie professionnelle des héros. Nous donnions peu de choses au niveau de la vie privée, mais il y avait tout de même des petits fils qui étaient tirés d’épisodes en épisodes (l’émancipation de Pauline, la relation Valour/Léa…)

Season One: On a souvent comparé la série aux Brigades du tigre qui rencontrent Les Experts. Etait-ce vraiment votre modèle? Pour ma part, je ne pense pas totalement car la série s’en éloigne vite.

L.O: Le modèle, c’était C.S.I (structure des épisodes, « flashs », séquences « clippées »…) bien plus que les Brigades du Tigre. C’est ce qui a servi de base à la réflexion. Pour autant, je pensais qu’il était impossible de faire une série policière située dans les années 20 sans être comparé aux Brigades du Tigre… C’est pourquoi je pensais qu’il aurait été sympa de jouer avec la mémoire des téléspectateurs en faisant interprété le directeur de la police par l’un des comédiens des « Brigades ». Une façon de passer le témoin. A plusieurs reprises, la chaîne nous a bien précisé qu’il était important de se démarquer de la série d’Antenne 2.

Season One: Le générique de la série décrit bien le « double visage » de la série. Moderne vs années 20. Etait-ce votre point de vue dans tous les aspects de l’écriture? Comment avez-vous veillé à ce que cela soit retranscrit à l’image?

L.O: L’idée était de jouer ce décalage à tous les niveaux de l’écriture, aussi bien dans la caractérisation des personnages que dans les enquêtes qu’ils menaient. Le premier épisode met en scène une vedette du muet, le second se déroule dans l’Orient-Express, le troisième dans une Maison Close, le quatrième nous montre un « Bal-Nègre »… Autant d’univers fortement ancrés dans une temporalité. Il était important que nos personnages soient raccords avec leur époque (sur la situation des femmes à cette époque, leur rapport au racisme …ou au détour d’un dialogue: dans l’épisode 1, le patron d’une usine se plaint que la durée hebdomadaire de travail vient d’être réduite à… 48 heures par semaine… !) Pour ce qui est de la mise en image, il y a eut un vrai travail sur les décors et les accessoires.

Redécouvrez notre dossier sur le générique de la série avec Damien Maric

Season One: Le personnage de Valour est très sombre, et va plutôt loin. Aviez vous un modèle pour le créer (il y a un peu de Abberline de From Hell en lui) et souhaitiez-vous allez plus loin que vous ne l’avez finalement fait?

Valour

L.O: Olivier, Stéphane et moi avons longuement discuté de Valour. Ça faisait partie d’une réflexion globale sur les personnages. Ils étaient déjà posés dans la bible de la série, mais nous les avons repensés ensemble. La chaîne était demandeuse de ce travail. Nous voulions que chacun d’eux ait une voix qui lui soit propre, sa propre grille de lecture des événements. Valour est quelqu’un qui est dévoré par la frustration. Pourquoi n’est-il pas reconnu comme il devrait l’être, placardisé et réduit à jouer la cinquième roue du carrosse alors qu’il a une vraie longueur d’avance sur tous les autres flics ? Il n’en peut plus de cette situation. Nous le prenions au moment où on lui donne sa chance. Et plus son équipe commence à aligner quelques succès, à obtenir quelques reconnaissances, moins il maîtrise les problèmes liés à son addiction. Nous avions fait le choix de ne pas donner toutes les clés sur les personnages mais de distiller des éléments au détour d’un réplique, d’une séquence pour mieux les découvrir progressivement, (l’homosexualité de Marius, le passé de Cassini, …).

On verra juste après comment le tournage s’est déroulé ainsi que ce que serait devenue la série en saison 2 mais quelques mots tout d’abord sur la série. Empreintes Criminelles est une série française qui avait dans les mains toutes les cartes pour devenir une très bonne série.Elle n’échappe pas aux traditionnels défauts propres à nos séries et qu’on a déjà mentionnés à de nombreuses reprises comme le fait qu’elle prenne un peu trop le temps de s’installer et que le premier épisode n’est pas forcement le plus réussi. Mais Empreintes Criminelles a pour elle de nombreuses qualités. En premier lieu, un casting assez fort porté par le très intéressant personnage de Valour, flic en permanence sur le brèche et dont les développements tout au long de la saison 1 sont des plus intéressants. Mais la galerie de personnages secondaires n’a pas été oubliés et l’un des plus intéressants est celui de la femme légiste. Exerçant un « métier d’homme », elle doit en permanence se battre pour trouver sa place. Son évolution tout au long de la saison est vraiment intéressante.
Egalement des histoires qui se densifient au fil de la saison. Outre le côté amusant de voir se développer les prémices de techniques scientifiques que l’on connaît aujourd’hui, la manière dont la série interroge notre histoire est des plus intéressantes. Comme je le souligne dans l’interview, l’épisode 4 est le meilleur de la saison, d’une grande densité émotionnelle et un traitement qui le rapproche de ce qu’aurait un
Cold Case, avec bien entendu des défauts mais la démarche est très louable. On saluera aussi le travail fait sur l’image. On en parlait dans notre dossier sur le générique de la série mais un vrai travail a été effectué tant sur les lumières que sur la reconstitution de Paris qui donne une vraie identité visuelle à la série.
Enfin, le « season finale » est non seulement un vrai épisode de fin de saison, mélange de tension et de préparation du final, mais aussi un épisode qui pose les bases d’une future saison 2, là où d’ordinaire les scénaristes pensent plus à tout conclure, sans ouvrir vers la suite.

Season One: Comment s’est passé pour vous la phase du tournage? Avez vous eu les coudées franches pour maintenir votre idée de départ?

L.O: Au moment du tournage, j’étais plongé dans l’écriture de la saison 2 (nous avons écrit six épisodes jusqu’aux versions dialoguées de la saison 2) et mon principal lien avec le tournage consistait à réécrire des séquences en fonction des problèmes de décors. C’était une situation nouvelle (suivre les textes au delà de la phase d’écriture) et vraiment intéressante pour moi même si c’était aussi frustrant : vous gérez les textes, peaufinez les dialogues, les situations… et soudain, c’est le réalisateur qui prend le relais avec une vision qui n’est pas toujours exactement dans la droite lignée de ce que vous envisagiez… même si les producteurs (Making Prod et Septembre Productions) encadrent les choses.

EC meurtre

Season One: La série opère un tournant avec le magnifique épisode 4, tout en émotion et qui me rappelle un peu l’ambiance des enquêtes d’une série comme Cold Case en abordant la colonisation). Etait-ce votre but à terme, Interroger notre histoire?

L.O: Soiliho Boidin et Nicolas Clément (les deux scénaristes de l’épisode) sont venus avec ce pitch qui nous a tout de suite intéressés. Au delà du fait historique, j’y ai vu la possibilité de mettre en avant nos personnages et leurs contradictions. A commencer par Cassini : c’est clairement quelqu’un de moins instruit que le reste de l’équipe, qui ne comprend pas les subtilités de la police scientifique à la Valour… Mais c’est un bon flic, « à l’ancienne », plus humain et avec plus de vécu que les autres… C’était intéressant de voir comment ce type raciste, ancien militaire, allait réagir dans cet épisode.  C’était un très bon cocktail : nous avions à la fois une intrigue policière forte, qui raconte quelque chose sur la société française de l’époque, et des personnages questionnés sur leur valeur : deux visions de la justice qui s’opposent, des personnages qui révèlent leur complexité: Valour en se montrant rigide sur l’application de la loi au moment où son secret a été percé à jour et un Cassini qui ne cache pas son racisme mais prend conscience de certaines injustices et agit en conséquences. Ce sont les personnages qui priment sur l’enquête ou le sujet.

Avant de poursuivre cette interview et voir à quoi aurait ressemblé la saison 2 de la série, intéressons-nous à la programmation par France 2. On oublie trop souvent l’importance de la programmation d’une série dans son succès ou son échec. Quand la série arrive sur France 2 en 2011, elle est déjà prête depuis un long moment puisqu’elle fut présentée à la première édition de Séries Mania un an auparavant. Plutôt que de surfer sur les retombées du Festival, la chaîne décide de patienter une année de plus pour la diffuser. Ainsi tout le bénéfice que l’on pourrait retirer de la mise en avant dans un Festival s’en trouve totalement anéantie. L’avant première ne sert et ne rime plus à rien. Lorsque la série est enfin annoncée, la chaîne lui offre « la meilleure » des diffusions qui soient: 2 soirées de 3 épisodes. France Télévisions n’en ait pas à son coup d’essai en la matière, des séries comme Le chasseur, La commanderie ou 1789 1/2 ont déjà fait les frais d’une telle programmation. En langage de communicants, on vous dit que c’est dans le but de booster la série en lui offrant deux  grosses soirées, mais pour être clair, on sait que quand on liquide en deux soirées une série c’est qu’on y croit pas et qu’on veut s’en débarasser. Si la série compte au minimum 12 épisodes, cela peut avoir du sens (Platane ou Kaboul Kitchen sont diffusées de cette manière sur Canal+, mais plus en raison de leur format de 26 minutes). Mais sur 6 épisodes c’est juste totalement ridicule. Aucun travail de fidélisation ne peut être fait puisque aussitôt la série commencée qu’elle se termine. De la même manière, comment voulez-vous convaincre des téléspectateurs qui auraient raté la première soirée de venir la seconde puisqu’il s’agit aussi de la dernière. En somme, c’est un non sens total…

empreintes-criminelles-équipe-photo-france-2

Season One: A quoi aurait ressemblé la saison 2 si elle avait vu le jour? Qu’aviez vous envie de raconter?

Lionel Olenga: Les six épisodes de la saison 2 ont été écrits (jusqu’à la première version dialoguée). Nous avions tiré les leçons de cette saison 1 et avions corrigé le tir: par exemple, il n’y avait plus qu’une seule intrigue par épisode et nous avions apporté un soin particulier à mettre en avant les différents personnages.  La saison 2 démarrait quelques semaines après la fin du dernier épisode. L’unité était dissoute, Valour était en prison, Cassini était de retour sous les ordres de Gilardi, Pauline était séparée de son mari, rejetée par sa famille… Toute l’équipe se reformait en off et se mobilisait pour sortir Valour de prison et remettre l’unité sur les rails : une histoire de manipulations qui posait en même temps les bases de la suite de la série, avec un Valour désintoxiqué – mais forcément fragile et susceptible de replonger – à sa tête. Tout en restant dans les premiers pas de la police scientifique, nous avons cherché à explorer chaque personnage au détour des intrigues. On découvrait comment et pourquoi Marius avait abandonné une carrière scientifique pour entrer dans la police, le meurtre d’une gueule cassée permettait d’approfondir le passé militaire de Cassini (et comment il lui était insupportable de voir un frère d’armes handicapé à la suite d’une explosion d’obus, à tel point qu’il préférait lui tourner le dos…) Bref, on s’était focalisé à raconter plus de choses sur nos persos… et on en avait sous le coude. La saison se terminait pas un cliff qu’on voulait aussi marquant que le premier : une enquête sur un meurtre amenait l’équipe à découvrir l’existence d’une importante arnaque qui impliquait des politiques et de riches industriels… le genre d’affaires qui rend nerveux Blanchard, le directeur de la police… Après avoir arrêté le coupable, un des membres de l’équipe, resté seul au bureau, comprend que le meurtrier qu’ils ont abattu n’était qu’un pion… que celui qui tirait les ficelles de cette affaire n’était autre que Blanchard, présent depuis le premier épisode. Avant qu’il ne puisse communiquer l’information au reste de l’unité, on assistait à son meurtre par Blanchard…

empreintes2

Empreintes Criminelles aurait pu être une bonne série si on lui avait laissé sa chance pour faire ses preuves. Mais parasitée par une programmation hasardeuse et des débuts hésitants, la série n’est pas parvenue à trouver le chemin vers la saison 2 (qui s’annonçait vraiment intéressante). Reste qu’elle aura permis de mettre en avant le savoir faire d’une société de production qui fait beaucoup parler d’elle aujourd’hui ainsi que des scénaristes qui aiment les séries et en connaissent les codes, une démarche primordiale pour écrire des séries que le public aime. 

Crédits: © France 2/Bernard Barbereau

  • Rozoro

    Je suis tombée hier soir sur cette série, par hasard, et je dois admettre qu’elle a piquée ma curiosité. Je n’ai pas vu le début, j’étais trop crevée pour voir la fin, mais le contexte et les personnages m’ont marquée. Je pense regarder la saison en entier, même si malheureusement je sais qu’il n’y en aura pas de prochaines.

  • chaosad

    idem, je suis tombé dessus par hasard cette semaine et j’ai aimé!
    Cette histoire est la preuve qu’encore une fois que la france n’a rien compris aux séries télé

    • darkvador

      j’ai également aimé cette série que je ne connaissais pas du tout. Elle change de ces « copié-collé ». J’aurais bien aimé voir une suite à croire qu’on n’aime vraiment pas le changement. Pour une fois qu’on avait des personnages vrais

      • RDV demain sur Season One pour découvrir le scénario du season premiere INEDIT de la saison 2 😉

  • Pingback: Exclusif: Empreintes Criminelles Saison 2 Episode 1 | Season One()

  • alfabeta

    Toujours aussi débiles les responsables de programmes !
    Cetrte série était très bien

  • TAMUY

    Dommage, que lon aime pas le talent et la curiosité en france