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Un village français saison 5: L’étoffe d’un héros

Un village français saison 5: L’étoffe d’un héros
Alexandre LETREN

La review

LA SAISON
8
LE SCENARIO
8.5
LE CASTING
8
8.2

BRILLANTE

Une nouvelle fois, Un village français tire la fiction vers le haut. Et ça fait du bien. Bouleversé, retourné, la gorge noué...Voici ce qui vous attend!

Après de longs mois d’attente, la saison 5 de Un Village Français va enfin faire son arrivée sur France 3. Âpre, intense, bouleversante, cette saison marque un tournant pour la plupart des personnages de la série. Au tournant de la guerre, l’heure est venue pour chacun de choisir son camp et, si possible, le bon. Certains agissent, d’autres se radicalisent. Mais chacun se prépare, à sa manière, pour la fin. Et force est de constater qu’il va y avoir des larmes. Beaucoup de larmes.

Rappelons d’abord avant de commencer que l’année 1943, au cœur de cette nouvelle saison, est une année charnière pour la seconde guerre mondiale. Notamment avec deux événements majeurs, deux événements qui auront des répercussions au sein de cette saison.
1943 c’est d’abord l’année de l’instauration du STO en France (Service de travail obligatoire) qui envoie des jeunes hommes travailler de force en Allemagne. Certains refuseront cette situation et partiront rejoindre la Résistance, Résistance qui s’unifie en cette année 43.
1943 est aussi l’année de la défaite de l’armée allemande à Stalingrad contre l’armée rouge. Dès lors, le mythe d’invincibilité de Hitler s’effondre et l’issue de la guerre semble inévitable.

sto

Les collabos/Les nazis

Cette nouvelle saison fait la part belle une nouvelle fois à ces obscures personnages qui ont fait le choix (ou pas) de tourner le dos à leur pays et d’embrasser la voie de la collaboration, qu’elle soit par nécessité ou par conformité à ses propres idéaux. Esquissé en saison 4, l’ignoble Chassagne peut se laisser aller à ses plus vils instincts lors de cette nouvelle saison. Avec son sourire carnassier, le comédien Philippe Résimont lui donne toute son ampleur. Je parlais pour la saison 4 de la naissance d’un vrai salaud, il le devient assurément en saison 5 même si on ressent une petite pointe de déception quant à son traitement. Il était plus fin en saison 4, et devient plus caricatural ici. Mais la fin de la saison lui rendra grâce à des moments réellement incroyables, on y reviendra. Si le mot « choix » reviendra beaucoup dans cette article et dans cette saison, Chassagne assume clairement les siens et ça le rend véritablement glaçant.

philippechassagneL’armée allemande était présente dans les saisons précédentes avec le personnage de Colvitz. Elle disparaît quasiment dans cette nouvelle saison pour laisser la place aux Nazis et notamment à Muller qui redevient non seulement plus présent mais surtout plus intéressant. Malgré son incroyable cruauté, Müller est un homme aux abois dans cette saison. Fin stratège, il sent que l’Allemagne ne peut plus gagner la guerre et ça lui fait peur. Et en homme qui a peur, il devient plus dangereux. Bon nombre de personnages de la série le découvriront. Une nouvelle fois, saluons l’incroyable talent d’écriture des auteurs de cette série. Mélangé avec l’incroyable jeu du toujours génial Richard Sammel, ils parviennent à rendre « humain » le plus épouvantable des monstres. Sans rien vous révéler, surveillez bien le triangle Müller/Gustave Larcher/ Marcel Larcher et vous verrez de quoi je parle.

heinrichmuller

Les opportunistes

Peut-être pires que les collabos, il y a celles et ceux qui ont une certaines proportion à retourner leur veste en toute circonstance. Et à ce petit jeu, force est de constater que le Préfet Servier et Jeannine Chassagne en sont de brillants représentants. Ces deux sinistres personnages n’hésitent pas à changer de position tout en continuant de collaborer. On pensait d’ailleurs que Servier était l’incarnation de ce que l’on pouvait voir de pire en politique. On se rendra compte qu’il a fait un mariage heureux car sa femme n’a vraiment à lui envier. Une joute verbale entre eux deux au restaurant va je n’en doute pas vous laisser sur les fesses (pour ne pas dire autre chose). Il  ne fait d’ailleurs plus de doute que les auteurs de la série veulent qu’il s’en sorte après la guerre, montrant ainsi comment d’anciens collabos ont pu « se recycler » et échapper à l’épuration (qui a dit Papon?)
Quant à l’infâme Jeannine Chassagne, incarnation de l’antisémitisme à la française, elle fait durant cette saison un choix des plus surprenants, dicté par les circonstances. Tout comme Richard Sammel, Emmanuelle Bach réussit à rendre fascinante un personnage détestable. Beau travail à nouveau des auteurs  et de cette excellente comédienne.

Les résistants…de gré ou de force

Cette saison 5 est celle de la Résistance, filmée avec force et émotion sous tous les angles. La série a toujours pris le parti de ne pas montrer la seconde guerre mondiale de manière manichéenne, et où la vie n’est pas toute blanche ou toute noire. La Résistance n’échappe pas à cette règle. A la manière d’un film comme L’armée des ombres, elle nous est aussi présentée sous des aspects dures (mais nécessaires?). La dernière scène dans l’école dans l’épisode 12 saisissante (elle m’a pour ma part vraiment retourné). Et cette saison ne va pas nous épargner au niveau émotion. Si vous n’avez pas la boule au ventre à de nombreux moments, je ne sais pas ce qu’il vous faut. La relation des frères Larcher explose comme jamais. Pour la première fois, Daniel va devoir s’engager et ne peut plus, comme Raymond Schwartz d’ailleurs, ne rien faire et tenter d’arrondir les angles. Il va devoir agir et va d’ailleurs en payer le prix. Si Robin Rennucci est toujours très bon, mention spéciale à Fabrizio Rongione (Marcel Larcher). Il est bouleversant en résistant fidèle à ses idées quitte à en payer le prix fort. Son jeu est incroyablement juste. Et touchant!

marcellarcher

Mais LE personnage de cette saison, c’est Antoine. Antoine est un personnage qui me touche particulièrement. Jeune contremaître à l’usine Schwartz, il est appelé au STO mais décide de s’enfuir et va rejoindre, malgré lui au départ, le maquis. Ce personnage me touche car, au travers de lui, je retrouve le destin de mon grand-père aujourd’hui disparu et qui fut, lui aussi appelé au STO et qui refusa d’y aller, embrassant le chemin de la Résistance. Comme Antoine, il a vu certains de ces compagnons d’armes tomber sous le feu des Allemands et comme Antoine, il a dû continuer d’avancer pour que triomphe ce pourquoi il se battait.
Antoine, c’est aussi la naissance d’un chef qui, pour le devenir, va devoir faire des choix. Parfois, ces choix seront heureux comme l’incroyable défilé du 11 novembre dans les rues de Villeneuve; parfois malheureux comme en fin de saison. Et le jeune Martin Loizillon est juste. Très juste dans ce rôle. Le voir perdre  toute son innocence au fil de la saison est à la fois beau et dur.

Antoine Maquis

…et puis il y a les autres…que l’on aime…ou pas…

Comme dans toute série, chorale qui plus est, il y a des personnages moins mis en avant selon les saisons. On regrette par exemple que l’excellent Thierry Godard ne soit pas plus présent; que l’impressionnante Nade Dieu (Marie Germain) n’est pas un rôle plus développé cette saison. Elle disparaît au profit (et on ne s’en plaindra pas) d’Antoine; que l’on ne donne pas autre chose à jouer à Audrey Fleurot pour Hortense que l’éternelle partition qu’elle joue depuis la saison 3 à savoir cette femme froide, que rien ne semble pouvoir atteindre et qui accepte tout de la part de son amant Müller.
Et puis, il y a Lucienne. Très particulier ce personnage. Comment des auteurs aussi brillants que ceux qui parviennent à nous faire nous intéresser à Müller, ne parviennent pas à créer un début d’intérêt pour ce personnage? C’est assez terrible d’ailleurs car quoi qu’elle fasse, ce personnage ne parvient jamais à éveiller autre chose que de la détestation. Et la toute fin de la saison ne va rien arranger du tout. Marie Kremer fait ce qu’elle peut mais rien n’y fait, je reste totalement imperméable. Et, pour la première fois depuis le début de la série, j’ai la sensation que l’arche narrative qui la concerne cette saison est totalement factice et assez dénuée d’intérêt…en tout cas jusqu’à la toute fin où elle prend une vraie dimension tragique d’une rare intensité. Une fois la saison 5 refermée, je pense que l’on peut dire que Lucienne a définitivement « basculé ».

lucienneberiot

Une fin bouleversante et surtout MAGISTRALE!!

Non rassurez-vous, je ne vais rien vous révéler sur cette fin de saison. Ce qu’il s’y passe est si juste, si émouvant, si terrible, si remarquable qu’il faut le découvrir par vous même. Mais ne ratez rien! Ne ratez pas les scènes incroyables entre Chassagne et Marcel Larcher, le destin des frères Larcher, les choix audacieux mais nécessaires que font les scénaristes concernant certains personnages,…et puis cette incroyable fin. Comme un écho à celle de la saison 4. Sombre, tragique!!! La gorge nouée, vous assisterez à une grande et belle scène. Des personnages secondaires aux premiers rôles (Richard Sammel est magnifique!!), tout est réglé comme du papier à musique. Ou plutôt comme une pièce de théâtre finalement. Car à l’image de l’ensemble de la saison, les auteurs ne font pas du remplissage et ne montrent pas des scènes ou ne nous font pas entendre des dialogues inutiles. Le dernier plan s’arrête sans qu’on nous dise clairement à l’image ce qui arrive à ces personnages…car on le sait. Et c’est triste et beau à la fois!!!

Village 5

La saison 5 de Un village français, c’est de la grande fiction. Qu’on se le dise. Des scènes d’une grande justesse, des comédiens de talent qui servent un projet à leur mesure et des partis pris intéressants (comme montrer l’ennui des débuts pour les jeunes résistants, loin de l’image d’Epinal des actions héroïques-il y en aura aussi), tel est le cocktail de cette nouvelle saison.
Mais ce que je retiens c’est ce que la saison provoque en moi, une nouvelle fois. Je ressors du visionnage de ces épisodes vraiment ému. Ému de l’histoire bien entendu mais également de voir ce que ces auteurs ont décidé de me raconter. Quand on aime les histoires, qu’on aime les suivre sous forme de séries, on est content de voir que des auteurs me respectent vraiment en me prenant par la main et en malmenant mes émotions. Mes sentiments.
Quand c’est bien raconté, j’aime faire les montagnes russes des émotions et j’aime ressortir dans l’état dans lequel j’étais à la toute fin du 12ème épisode. Et pour ça, je ne les remercierai jamais assez!

Crédits: © Tétra Média/ France 3

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Fabrizio Rongione Martin Loizillon Richard Sammel Un village français Emmanuel Daucé Un village français France 3 Un Village français Frédéric Krivine