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4 Commentaires

Bates Motel: La naissance du mal

Alexandre LETREN

La review

LA SERIE
7.5
LE SCENARIO
7
LE CASTING
8
7.5

COUP DE COEUR

Bates Motel n'est nullement une trahison au film d'Hitchcock. C'est une brillante relecture d'un personnage mythique que l'on pennsait connaître

C’est à partir du 25 octobre 22h15 que la série Bates Motel va faire son arrivée sur 13ème RUE. Avec cette série, c’est à une plongée dans l’univers particulier de Norman Bates que vous êtes conviés. Figure incontournable du cinéma grâce aux talents conjugués de Alfred Hitchcock et Anthony Perkins, Norman Bates est l’un des meilleures personnages de serial killer que l’on ait pu voir. Par le biais de cette nouvelle série, c’est aux origines de ce psychopathe que l’on vous propose de remonter. 

De Norman Bates, on ne savait finalement que peu de choses si ce n’est ce que l’on découvrait à la fin de Psychose. On sait qu’il va tuer Marion Crane en « endossant » l’identité de sa mère, une femme qui « le pousse » au meurtre et qu’il a aussi assassinée quelques années auparavant avant de l’empailler, refoulant le crime au plus profond de lui et gérant « comme si de rien était » le motel familial. En 1990, pour les 30 ans du film original, Henry Thomas (Eliott dans E.T ndlr) endosse le rôle d’un Norman Bates jeune devant la caméra de Mick Garris et sur un scénario signé Joseph Stefano, déjà auteur du scénario du film de Hitchcock. Dans ce film, on retrouve Norman à peu près à la même époque que dans la série Bates Motel mais à une étape plus avancée dans l’histoire: le moment où Norman tue sa mère. Sans aucune subtilité, le film nous présente la mère de Norman non seulement comme possessive, castratrice mais aussi incestueuse. Un parti pris que la série n’a pas encore franchi même si elle joue fortement sur l’ambiguïté de leur relation. Une relation fascinante que l’on découvre plus en détail dans la série et qui amène à une réalité terrifiante: la naissance d’un tueur en série.

Bates-Motel Norma Norman

Norman est un personnage de fiction « fascinant » et bien entendu complexe. Quand la série démarre, il vient de perdre son père et, suite à ce drame, sa mère décide de déménager et de l’emmener à White Pine Bay où elle a pris possession d’un motel et d’un superbe manoir. Norman est un jeune adolescent perturbé, hyper émotif pour son âge et dont la mère, sentant que quelque chose ne va pas, a parfois tendance à le surprotéger. Au point que leur relation a cessé d’être une relation normale mère-fils pour devenir une relation beaucoup moins « naturelle ». Elle laisse à Norman le soin de prendre soin d’elle comme si il était son homme, et elle s’immisce dans sa vie privée, dans sa vie sentimentale, sexuelle même comme une mère ne devrait pas le faire. Critiquant ses choix, orientant ses décisions et empêchant littéralement tout épanouissement personnel du jeune homme. Si par moment Norman semble conscient que cette interférence n’est pas normale, il tombe petit à petit de plus en plus sous sa coupe. Car plutôt que d’essayer de « relever » son fils, Norma fait peser sur lui un sentiment qui est déterminant: la culpabilité. Et cette culpabilité va être omniprésente dans la vie de Norman, resserrant l’étau que Norma exerce sur lui.

Norman 2

Norma est un autre personnage de la série extrêmement complexe et que Vera Farmiga campe à merveille. Femme totalement instable, les soupçons « pèsent » sur elle assez vite quant à la disparition de son mari. Cette femme incapable de gérer son stress étouffe littéralement son fils qu’elle considère un peu comme son point d’ancrage. Sa stabilité. Sans se rendre compte de l’image qu’elle envoie vers lui. Tantôt aimante avec Norman qu’elle protège, elle peut aussi l’abandonner sur la route après une dispute ou dire à son fils que la fille avec qui il a eu une histoire n’est qu’une traînée pour avoir couché avec lui. Chez un jeune aussi perturbé que lui, les effets sont dévastateurs. Car Norma a construit toute sa vie autour de son fils, en fait sa chose. On comprendra très vite dans la saison qu’un événement de l’enfance de Norma vient, là aussi, expliquer cet aspect de sa personnalité. Un événement terrible. Tragique. Mais là aussi, en choisissant de révéler à Norman ce qui lui est arrivé au moment où il va pouvoir profiter d’une soirée agréable au bal de l’école, Norma continue d’exercer sur Norman le poids d’une culpabilité qu’il ne devrait pas porter, utilisant ainsi ses propres drames pour garder son fils près d’elle.
Et bien sûr, un autre personnage vient s’immiscer dans ce « couple ». Un personnage déterminant: la mort. Elle rôde en permanence autour de Norman, de manière directe (la mort de son père), indirecte (la mort du père d’une de ses amies, Bradley), ou bien encore de manière frontale puisque dès le premier épisode, Norman est confronté à une scène de meurtre d’une rare violence, commis par la seule personne qui devrait représenter « l’espoir » pour lui: sa mère. Dès lors, la descente aux enfers de Norman (et, par la même occasion, de celles et ceux qui l’entourent) peut commencer.

Norman

La série nous présente d’une manière très juste ce changement qui est en train de s’opérer chez Norman. Au départ, en tout cas le croit-on, il ne s’agit que de changements inquiétants, qui perturbent le jeune garçon comme lorsqu’il conserve « un trophée » après le meurtre commis par sa mère. Mais rapidement, Norman fait des rêves étranges, des rêves où la mort n’est jamais loin. Face à n’importe quelle personne, on ne se poserait pas les mêmes questions que là car le public connaît l’histoire. Il sait ce que va devenir Norman. Et la série joue parfaitement bien sur cette connaissance du mythe. Comme lorsqu’il devient ami avec Emma, jeune fille dont le papa tient un magasin de taxidermie. Celles et ceux qui ont vu Psychose savent que ce sera un élément déterminant du personnage. Mais si il n’est qu’un gadget, un clin d’œil au début de la saison, il devient petit à petit un élément essentiel et parfaitement bien amené. Un élément qui va permettre à Norman de « gérer » deux choses qui peuplent sa vie: la culpabilité et la mort. Et même, la culpabilité d’avoir le sentiment d’être responsable de la mort. Si ça ne commence pour l’instant qu’avec le chien qu’il a trouvé et dont il pense avoir causé la mort, on sait que, par la suite, cela aura une toute autre signification.

norman 2 faces

Et puis il y a le comportement de Norman. C’est impressionnant de voir la justesse avec laquelle Freddie Highmore lui donne tout sa complexité. Doté d’un visage très juvénile qui donne à ce personnage un air des plus doux, des plus enfantin, il est aussi capable de lui donner un caractère parfaitement effrayant. Ses crises de colère face à sa mère sont terrifiantes, à vous glacer le sang. S’il semble garder cette violence au fond de lui, elle va pourtant aller crescendo tout au long de la saison jusqu’à une scène finale avec sa professeur de lettres qui ouvre la voie au Norman Bates que l’on connaît. Car pour la première fois peut-être, il affiche le visage qui sera le sien et que le public connaît dans le film Psychose.

Bates Motel n’est pas une totale réussite. Les intrigues secondaires polluent un peu la série qui n’en a pas besoin et qui ne servent qu’à étendre la série. Elle gagnerait à n’être finalement qu’un drame humain qui se joue devant nous et qui va aboutir aux événements que l’on connaît. Mais le jeu des deux acteurs principaux est en revanche juste brillant et les deux comédiens sont en parfaite symbiose. Mise à part les intrigues secondaires, les événements qui se jouent en fin de saison laissent espérer une saison 2 passionnante car Bates Motel joue vraiment la carte de la subtilité dans le traitement de Norman en se refusant à en faire un horrible monstre. En lui préférant toute l’ambiguïté qui le caractérise, elle nous permet de mieux saisir l’incroyable personnage de fiction qui est devant nous.

Crédits: © Universal Television/ Universal