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2 Commentaires

On entre en Résistance sur TF1

On entre en Résistance sur TF1
Alexandre LETREN

La review

LA SERIE
7
LE SCENARIO
6.5
LE CASTING
7.5
LA REALISATION
7
7

CLASSIQUE

Très belle fiction qui change des traditionnelles fictions de TF1. On lui reprochera en revanche son côté trop scolaire

Résistance est un événement pour TF1 et pour nous téléspectateurs. D’abord de part l’ampleur du projet. Mais aussi car d’ordinaire, la ligne éditoriale de la chaîne se limite à polar et comédie bien française du lundi soir. Aussi, voir débarquer une fiction qui ausculte notre Histoire en prime time sur la plus grande chaîne de France mérite que l’on s’y intéresse de près. Avant d’autres projets à venir sur lesquels travaille la chaîne et qui l’éloigne de ses genres habituels (comme le fantastique avec l’adaptation de la série Marchlands), regardons si pour son premier essai, la chaîne s’en sort bien. 

Paris, 1940. Révoltée par l’injustice de l’Occupation, Lili, dix-sept ans, rejoint un groupe de résistants pour combattre les Allemands et leurs collaborateurs français. Tandis que la lutte clandestine s’étend à la France entière, les jeunes combattants multiplient les faits d’armes héroïques, en s’exposant à l’implacable répression de l’ennemi. Ils mettent en place des réseaux de résistance qui ont conduit jusqu’à la libération de Paris, en août 1944.

Une belle fiction de prestige…

Cette plongée dans la Résistance française donne une vraie belle série de qualité, pas seulement pour TF1, mais de manière générale. Par son écriture soignée, son interprétation juste et sa réalisation maîtrisée, Résistance est une série qui parvient à nous apprendre des choses et, c’est assez rare sur TF1 pour le souligner, nous divertir en même temps. Ça joue bien, notamment dans la jeune génération de comédiens, la jeune Pauline Burlet en tête: « Battante, Lily a envie de défendre ses opinions et de lutter contre les injustices. Sa mère est morte il y a plusieurs années et elle entretient des rapports compli- qués avec son père, ancien combattant blessé pendant la Première Guerre mondiale, devenu pétainiste. En total désaccord avec ses opinions, elle a quitté le sud de la France pour travailler à Paris afin d’être plus libre et de pouvoir vivre comme elle l’entend. Elle a trouvé un travail de dactylo au musée de l’Homme où elle participe secrè- tement à un journal clandestin, «Résistance». Mais elle cache tout de ses activités à son père. Elle va tomber amoureuse d’un autre jeune résistant qu’elle croisera sur sa route, surnommé le Gosse »

De grands noms les accompagnent et leur donnent la réplique comme Isabelle Nanty, Fanny Ardant (qui remplace ici Isabelle Adjani), ou encore Richard Berry (qui ne semble pas vouloir « assumer » cette série puisque, quand je lui demandais d’en dire un mot il y a quelques semaines lors d’une interview, il me répondait « Je n’ai que 3-4 scènes, ce n’est pas la peine d’en parler, je ne veux pas en parler« ), même si je trouve que ces prestigieux comédiens n’apportent finalement pas grand chose à la série si ce n’est son aspect prestigieux, ou, plus certainement, car il serait risqué sur une chaîne comme TF1 de faire reposer toute une série de ce niveau sur les épaules de comédiens inconnus.
Il y a de vrais moments de très forte intensité comme en fin d’épisodes 3 ou 4 lors d’exécutions au Mont Valérien. Certes, le scénario et la mise en scène insistent parfois un peu trop sur ces moments, ces longs moments où ces prisonniers sont conduits au peloton d’exécution, mais, et c’est terrible à dire, ça fonctionne bien, on est pris par ses moments et il est bien difficile de ne pas être pris par l’émotion qui monte en nous.

Dans Résistance, Dan Franck mélange la grande et la petite Histoire. Il a une vraie volonté de rendre hommage à ces combattants de l’ombre, pour qui il a un vrai respect, et ça se sent dans la série:

RESISTANCE« Nous avons décidé avec les producteurs de ne pas évoquer les résistants très connus. Mais nous avons longtemps débattu pour savoir si nous évoquerions Jean Moulin. A partir d’une masse énorme de documentation, j’ai choisi de manière totalement subjective quels personnages conserver. Parmi les premiers auxquels j’ai voulu rendre hommage, même s’ils sont un peu plus âgés, il y a les hommes du groupe du musée de l’Homme, représentés notamment par Boris Vildé. Ces intellectuels ont créé l’un des premiers réseaux de Résistance et ont encadré les plus jeunes. Ils seront les premiers à «tomber» et j’ai pour eux un infini respect. J’ai conservé des personnes auxquelles je suis particulièrement attaché pour di- verses raisons : Jeannot, qui est en réalité mon ami Jean Frydman ; l’imprimeur Velin ; Pierre Georges alias Frédo, mieux connu sous son pseudonyme, le colonel Fabien ; René Sénéchal dit le Gosse ; la garagiste Sylvette Leleu dont personne ne parle mais qui était pourtant une très grande dame… Le personnage de la comtesse a aussi existé. Je l’ai ajouté pour montrer que la Résistance n’est pas uniquement le fait d’une classe sociale. »

…mais qui n’apporte rien de neuf

Aussi belle soit elle, Résistance est d’un classicisme extrême, autant dans ce qu’elle montre que dans la manière dont elle raconte son histoire.

RESISTANCEQuand le projet Un village français a pointé le bout de son nez, je me souviens que je n’étais vraiment pas enthousiaste. Encore la seconde guerre mondiale!! Non pas que ça ne soit pas intéressant, loin de là, mais alors que la France a une Histoire très fournie, elle ne semble pas capable dans son cinéma ou sa fiction télé de s’intéresser à une autre période. Le sujet est décliné jusqu’à l’usure. Mais Un village français a su non seulement justifier l’utilisation de la narration télé pour narrer son histoire, mais aussi s’emparer des zones d’ombre et mettre du « gris » là où out avait souvent tendance dans les rapports humains à être « noir » ou « blanc ». Avec Résistance, on ne s’interroge pas sur cette période, on rend hommage à ces combattants. Je n’ai rien contre. En petit-fils de résistant dont le grand-père à rejoint les rangs quasiment à l’age de Lily, je ne peux que m’en réjouir. Mais en tant que spectateur, journaliste, cela ne me semble pas d’une grande originalité. Sans doute parce que désormais, une série qui irait sur le même terrain que Un village français, s’exposerait à une comparaison presque automatique. Car la série de Frédéric Krivine innove non seulement sur le fond, mais également sur la forme.

RESISTANCEQuand une fiction s’intéresse à une période longue de l’Histoire, il y a deux façons de la raconter. Soit en choisissant un moment précis qui illustre la période et/ou le personnage raconté. C’est le choix opéré par Un village français depuis la saison 3. Cela permet non seulement de ne pas chercher à tout dire et donc d’être trop scolaire, mais aussi de « tendre » l’action, de la rendre plus nerveuse. C’est très nette dans Un village français qui avait tendance à ces débuts à vouloir raconter chaque mois de chaque année à Villeneuve et qui, dès la saison 3, s’est focalisée sur une période de l’année et un événement clé (en saison 5, ce sont par exemple les commémorations du 11 novembre).
L’autre façon de raconter une période historique, c’est la manière plus « scolaire » choisies par Ceux de 14 (France 3) ou justement Résistance. On couvre toute la période, des débuts du phénomène (ici le 11 novembre 1940) à la fin (la Libération de Paris), le tout en opérant des ellipses temporelles au sein d’un même épisode. L’histoire se tend alors nettement moins, on est plus dans du récit historique (qui a aussi ses avantages attention), et vouloir raconter une période aussi vaste, aussi complexe en seulement 6 épisodes semblent presque vain si on ne veut pas rester en surface. Par exemple, ce que Résistance couvre en 6 heures, Un village français va le faire en 6 saisons de 12 épisodes chacune. Le propos est donc plus affiné dans le cas de la seconde tandis que la première va plus jouer sur les codes du grand spectacle. Si l’histoire racontée par Un village français justifie le traitement en série, celui de Résistance aurait été tout aussi judicieux en un film de deux heures.

RESISTANCE

 

Au final, Résistance est une vraie réussite pour TF1. Une belle série portée par de bons comédiens et parfaitement écrite. Cela faisait bien longtemps qu’une fiction de TF1 ne nous avait pas autant apporté, et même rassuré. Rassuré de voir que la première chaîne d’Europe peut encore mettre sur pied des projets réellement ambitieux sans penser pour autant qu’il suffit d’aligner les 0 sur un chèque dans le but de singer nos amis Américains.
Résistance est une belle fiction française écrite par un scénariste de talent. Qu’elle ne renouvelle pas le genre est vraiment dommage mais le spectacle vaut tout de même réellement le détour. 

Crédits: © GAUMONT TELEVISION/TF1/Claude MEDALE